Certaines mairies ont décidé de mettre en place des initiatives et des activités, sur le temps de travail ou en dehors, propices à l’épanouissement et au bien-être de leurs agents. Et si la fonction publique inspirait le secteur privé ?

Malika Laidi travaille depuis trente ans à la ville de Suresnes. Depuis trois mois, elle vient au bureau accompagné de son chien Hadès, le matin ou l’après-midi, trois fois par semaine. « Il m’apporte une tranquillité, et m’évite le stress de même qu’à mes collègues », se réjouit l’agente, employée au service ressources humaines. « Mon labrador se promène de bureau en bureau, dit bonjour, demande des caresses : un animal apaise les tensions, quand on passe une mauvaise journée, on s’assoit à côté de lui et l’humeur change », estime Malika Laidi. Aux Etats-Unis, 8% des entreprises accepteraient ainsi les animaux au bureau.

« Il y a aussi des personnes avec qui je parlais peu. Désormais, mon chien fait le lien et crée des passerelles vers les autres », raconte la propriétaire de l’animal qui a dû recueillir l’accord écrit de ses collègues avant de venir accompagnée. La présence des animaux domestiques au bureau est l’une des actions de la ville de Suresnes en faveur du bien-être de ses agents. « Une dizaine d’accord ont été signés sur la qualité de vie au travail, rappelle ainsi Béatrice de la Valette, l’adjointe en charge de ce dossier. C’est un investissement plus qu’une dépense ! »

Avant les animaux domestiques, les agents de Suresnes s’étaient vu proposer, dès 2014, des activités sportives hors du temps de travail d’abord (yoga, badminton, marche douce), puis depuis 2019 un réveil musculaire de 10 à 15 minutes et des activités diverses, sur temps de travail à la demande de la CGT. « Cela permet de s’étirer, de se préparer pour la journée en étant détendu. Ainsi, nous commençons la journée dans la bonne humeur et cela renforce la cohésion de groupe », apprécie David, agent à la communication. Malika Laidi est de son côté devenue référente pour animer ces ateliers du matin.

« Nous proposons aussi des activités sportives ou culturelles (chorale, jeux d’adresse multisports, arts du cirque, jeux d’oppositions et activités aquatiques) dont les compétences ciblées sont transposables dans les métiers. Ces deux heures par semaine (maximum) sont financées par le plan formation », détaille Béatrice de la Vallette.

Une baisse de l’absentéisme

La Ville de Poissy, de son côté, a mis en place « Poissy Bien-Être » en janvier 2017. Comme à Suresnes, les agents peuvent faire du sport, sur leur temps de travail. Aquajogging, gym d’entretien, tennis de table, aquagym, marche nordique, fitness outdoor, natation : l’ensemble encadré par des éducateurs sportifs. « Nous sommes convaincus que sport et santé sont intiment liés. Nous voulons des agents en pleine forme et agir concrètement pour la qualité de vie au travail. Lancer « Poissy Bien-Être » est un engagement fort dans la prévention des troubles physiques qui génèrent de l’absentéisme, c’est donc une opération 100% gagnant-gagnant », défend la municipalité de Karl Olive. Dès la première année de fonctionnement, Poissy a constaté une diminution de 5% de l’absentéisme de courte durée. « Cela représente une économie de 100 000€ pour la collectivité et nous en réinvestissons une partie dans l’amélioration de l’ergonomie des postes de travail », ont calculé les initiateurs qui ont développé depuis de nouvelles disciplines telles la chorale et la relaxation.

Cohésion et Reconnaissance

Des idées qui inspirent d’autres maires. A Neufchâtel-en-Bray, Xavier Lefrançois a ainsi lancé un diagnostic pour proposer d’éventuelles séances de relaxation ou massage. A Tourcoing, des « cool week » ont été organisées afin que les agents partagent leurs hobbies et passions. Des salariés de la ville et de la métropole d’Orléans proposent également à leurs collègues des activités gratuites, hors temps de travail, afin de favoriser le bien vivre-ensemble. Le programme dédié à la qualité de vie au travail de cette métropole est d’ailleurs placé au cœur du projet de collectivité, en allant au-delà des RPS.

Comme l’explique l’étude de la Fabrique Spinoza « Pour une fonction publique heureuse », elle a fait de la cohésion et de la reconnaissance des piliers de sa politique interne, notamment en formant les managers à cette question, en réalisant un travail d’harmonisation des statuts, et en les rendant ambassadeurs de nouveaux modes de travail. En complément, pour donner du corps à ce programme de QVT, Orléans organise des conférences, des ateliers, des serious games, un dispositif “Coach me”… Elle les a rassemblés en un “Printemps de la QVT” dès 2019. Elle a aussi développé une communauté d’agents désireux de contribuer à la transformation de l’administration. En sessions d’intelligence collective, ils ont par exemple défini les valeurs partagées du collectif, matérialisées en un totem.

Envie d’aller plus loin ? Découvrez l’étude réalisée par La Fabrique Spinoza « Pour une fonction publique heureuse ». Elle identifie et analyse les 9 grandes approches pour plus d’épanouissement au travail pour les agents :

  • Redonner du sens au travail des agents : comprendre sa place dans l’organisation, développer une vision commune, incarner et s’approprier les valeurs, témoigner de la reconnaissance et nourrir l’appartenance.
  • Co-construire un projet collectif : de nombreuses initiatives collaboratives ont vu le jour pour associer agents, citoyens, élèves, élus, entreprises, patients, usagers … pour co-construire de manière inclusive un projet.
  • Transformer la fonction publique par l’espace : la transformation vertueuse des espaces peut prendre une multitude de formes : création d’espaces solidaires, transformation en espaces collaboratifs, instauration d’espaces hybrides, création d’espaces nomades, design d’espaces aptes à favoriser le flow, adaptation des espaces aux activités de travail et aux différents styles de personnalité.
  • Transformer le travail lui-même : loin de l’image d’une fonction publique rigide et strictement verticale, différents modes managériaux innovants et humanistes y sont expérimentés par le jeu, l’expérience…
  • Transformer via le digital : il est possible de créer un “digital workplace” correspondant aux nouveaux besoins et mettant fin aux irritants fonctionnels ; les habitudes de travail peuvent être transformées, et offrir une digitalisation raisonnée et inclusive.
  • Alléger le cadre et les symboles au sein de la fonction publique : des stratégies individuelles d’émancipation permettent aux agents d’augmenter leur épanouissement au travail. Ces stratégies sont parfois institutionnalisées via des « corporate hackers » (ou « pirates institutionnels ») qui remettent en cause certains fonctionnements, et mettent ainsi les organisations au défi de la transformation
  • Prêter attention aux relations sociales : telle une image d’Epinal, le fonctionnaire peut apparaître tour à tour comme procédurier sans cœur ou bien comme un témoin exposé de la vulnérabilité. Il est possible d’impulser de la joie au travail, et les expérimentations sont multiples.
  • Prendre soin de la santé globale de l’agent : outre le soin des agents à leurs usagers, la fonction publique heureuse est aussi attentive à la santé des siens, et favorise la bonne santé tant environnementale, que physique, psychique ou sociale.

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Photo by Hugo Delauney on Unsplash

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Titulaire d’un master de journaliste au Celsa (Paris), Lucie Tanneau est journaliste indépendante, sillonnant la France, et plus particulièrement l’Est de la France au gré des thèmes de ses articles. Elle collabore à de nombreux titres, de Liaisons sociales magazine, La Vie, et Okapi, en passant par Grand Est, l’Est éclair, Village, et Foot d’Elles.

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