Depuis le début du confinement, nous vous proposons une série d’immersions dans des organisations déjà habituées au travail à distance pour partager leurs bonnes pratiques. Après la start-up Welcome to the jungle, direction la Région Ile-de-France, engagée depuis plusieurs années dans une transformation des modes de travail. Interview de Fabienne Chol, Directrice générale adjointe en charge des ressources humaines.

Où en était le Conseil régional d’Ile-de-France en matière de télétravail avant la crise du coronavirus et le confinement ?
Au siège de la Région, le télétravail est un dispositif ancré dans les pratiques depuis plus de 3 ans. Il s’inscrit dans une action globale portée depuis 2016 sur l’organisation du travail depuis l’arrivée de Valérie Pécresse à la tête de la Région en décembre 2015. Cette transformation plus précisément des modes de travail a été impulsée par le déménagement du siège de la Région à Saint-Ouen. Une promesse de Valérie Pécresse de rassembler tous les agents du siège de l’autre côté du périphérique. Un projet d’ampleur réalisé en deux ans par les services. Plus largement, l’ambition portée vise à libérer le travail pour redonner de la prise de décision aux managers, aux équipes. Déconcentrer les capacités d’action au plus près du terrain, au plus près des besoins des équipes. C’est une condition pour servir les franciliens au plus près de leurs besoins. Le télétravail, après une expérimentation à succès, a été généralisé au siège dès janvier 2018. 98% des effectifs ayant des métiers télétravaillables, 1 400 agents télétravaillent 1 à 2 jours par semaine.

Quels sont les impacts positifs engendrés par cette généralisation du télétravail ?
Le télétravail change les manières de collaborer et de manager. Il tourne la page du management de contrôle du temps de travail et son biais du présentéisme et amène la transition du management par objectifs. Une nécessité pour passer l’administration en « mode projet ». Le télétravail, c’est aussi moins de stress au travail et un gain de productivité[1] potentiel de 20% comme le montre certaines études. Il y a peu de mesures RH aussi performantes. Le télétravail implique une très bonne organisation de ses tâches et de son travail collaboratif. Désormais on vient au bureau pour échanger, se rencontrer, innover ensemble, bref nourrir la sérendipité de l’organisation. Les tâches de fond peuvent alors s’organiser sur les journées dédiées au télétravail. Le télétravail contribue ainsi au bien-être des agents, qui constitue un axe de performance collective de la politique RH de la Région. Enfin, il contribue à réduire le bilan carbone de l’organisation. La pratique du télétravail permet en effet d’éviter l’émission de 41 tonnes équivalent CO2, soit 30% des émissions totales des déplacements domicile-travail de l’ensemble des agents.

Qu’avez-vous mis en place pour que le télétravail fonctionne bien, notamment avec les managers ?
Avant son déploiement généralisé, les managers se sont préparés au télétravail. A la Région, notre stratégie est « changer avant le changement ». Anticiper, expérimenter, adapter au plus proche des besoins, et rester toujours dans un esprit de sur-mesure. Je crois résolument en l’approche RH qui créé des solutions, vient résoudre des problèmes, plutôt que des RH qui créent systématiquement des règles. Au sein du Campus des Cadres, la communauté des 250 encadrants du siège a développé une pratique et une maîtrise des outils pour le management des équipes à distance. D’ailleurs, pour assurer une pratique managériale cohérente, les encadrants ont co-construit la Charte managériale de la Région. Trois valeurs fondamentales constituent donc l’ADN de notre management : l’autonomie, la confiance et le sens du collectif. Les managers font ainsi évoluer leur rôle vers celui de facilitateurs au service des équipes. Pour les accompagner dans la continuité de ces ateliers de travail, le pôle Ressources Humaines propose régulièrement de nouveaux outils pratiques comme récemment le Guide du Télétravail qui présente notamment des rituels d’intelligence collective afin de faire face ensemble à la situation de télétravail continu en situation de confinement.

Qu’en est-il justement depuis le début du confinement ?
Face au COVID-19,  la Région permet le télétravail pour 99% des 1 700 agents du siège. Exceptionnellement, les agents ont la possibilité de télétravailler tout en gardant leurs enfants – toutes les heures faites sont autant de moins à répartir sur les autres collègues. L’expérience des grèves de décembre avait déjà amené les Ressources Humaines à anticiper les difficultés des agents en télétravail continu sur une période de 6 semaines. Les principaux enjeux identifiés étaient le sentiment d’isolement ressenti par certains, les conditions ergonomiques du travail à domicile et le sur-engagement. Sur notre intranet et lors des Conférences des encadrants[2] hebdomadaires, nous avons donc rappelé les bonnes pratiques pour prévenir ces risques du mieux possible, à savoir, de réduire les emails au profit d’appels téléphoniques, de saluer ses collègues le matin en créant des groupes sur les outils digitaux à disposition, de clarifier les objectifs hebdomadaires pour donner une perspective commune à l’équipe, ou encore d’installer son poste de travail conformément aux recommandations du Service Prévention et Santé.

Vous avez aussi organisé des web-conférences en live pour partager votre expérience sur le télétravail, pouvez-vous nous en dire plus ?
Les web-conférences de la Région Ile-de-France s’adressent à tous. D’ailleurs lorsque l’on regarde les participants, nous avons des DRH du privé et du public, en Ile-de-France bien sûr mais aussi en France et même au-delà ! Cette initiative traduit la volonté de la Région Ile-de-France de multiplier ses contributions pour aider les Franciliens dans la crise sociale et économique que le territoire traverse. Nous souhaitons être mobilisés sur tous les fronts. Ces temps d’échanges abordent la prévention des risques en télétravail, la gestion des handicaps et les meilleures pratiques en télétravail. Bref, voilà un tour d’horizon des sujets que nous abordons pour que nous puissions tous ensemble faire face au mieux à cette situation aussi difficile que particulière. Le bien-être et le suivi de la production sont les principales préoccupations de nos interlocuteurs lors des conférences live. Témoin de l’intérêt des DRH du territoire, les web-conférences ont rassemblé plus de plus de 500 professionnels. Parmi eux, de nombreuses collectivités, des grands groupes ou des professions libérales. Suite à cet engouement, nous avons rapidement organisé d’autres sessions assurées par des agents de la Région. Cette réactivité traduit toute l’agilité et l’engagement des équipes de notre administration. Je suis chaque jour impressionnée par la capacité d’initiative de chacun et l’agilité acquise par notre collectivité. Quand on libère le travail, on ne prend qu’un seul risque, celui d’être surpris par la capacité d’innover et de faire des équipes.

[1] Source : enquête 2016 cabinet Kronos
[2] La Conférence des encadrants est un échange téléphone de 30 minutes organisée chaque lundi depuis les grèves de décembre.

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Diplômée de Sciences-Po Paris, Fabienne Broucaret a fondé My Happy Job en 2016. Elle en a été la rédactrice en chef jusque fin 2022. Conférencière et journaliste, elle a écrit "Mon Cahier Happy at Work" (Solar) et "Télétravail" (Vuibert). Elle a aussi co-écrit “2h chrono pour déconnecter (et se retrouver)” avec Virginie Boutin (Dunod). Passionnée par les questions de mixité, elle est enfin l’auteure des livres "Le sport, dernier bastion du sexisme ?" et "A vos baskets toutes ! Tour de France du sport au féminin" (Michalon).

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