Alors que le sujet de la réforme des retraites bat son plein, il s’agit, de plus en plus, de s’interroger sur le travail des seniors. Pour Benjamin Zimmer, directeur de Silver Alliance et expert de la silver économie, ces collaborateurs précieux pour l’entreprise doivent voir leur qualité de vie au travail améliorée.

Quels sont les besoins exprimés par les seniors ?

Benjamin Zimmer : Actuellement, nous sommes dans une société qui n’a pas pris en compte le vieillissement de la population de manière générale. Ce vieillissement entraine une rareté des professionnels, notamment de santé. Quid de l’accès aux soins ? Quid de la prévention ? Les entreprises ont donc pour intérêt de prendre part, pour fidéliser tous leurs collaborateurs, à des initiatives qui facilitent les rencontres avec les professionnels de santé. Cela peut se faire en organisant en interne des journées de dépistage, de sensibilisation, d’informations. Bref, en agissant autour du care.

Ce n’est pas forcément le sujet de l’entreprise que de s’occuper de la protection sociale, même si cela fait partie du rôle des RH, mais c’est en train de changer. Notamment parce que les salariés attendent du sens dans leur travail.

Les seniors recherchent-ils aussi ce fameux sens au travail ?

Il faut que les entreprises travaillent ce sujet, surtout pour tout collaborateur qui a déjà plus de trente ans de carrière et qui devra travailler deux ans de plus. Autrement, il y a un risque de perte de motivation.

Les règles du jeu sont en train de changer, si bien que cela créera partout des conséquences sur le management.

Par quoi va passer la motivation des seniors ? La reconnaissance ?

Je ne regarde pas l’âge des gens sur un CV, je regarde s’ils sont compétents. Pour moi, être compétent, c’est savoir être, savoir faire, savoir faire faire. Les seniors ont ce savoir-être : ils ont beaucoup de qualités humaines qui compensent parfois certains manques dans les qualités techniques. Or, ces dernières s’acquièrent avec un peu de formation. C’est donc à nous, en tant que dirigeants, de créer les parcours adéquats pour favoriser les entreprises libérées où chacun peut se construire et grandir. A nous de mettre en place la culture d’entreprise, de mettre en place de la diversité : toutes les entreprises qui performent sur le plan financier performent d’abord sur le plan social, notamment grâce à cette diversité qui est liée aux talents, aux âges. Ainsi, tout le monde se sent embarqué dans une vision d’entreprise dans laquelle chacun a sa place.

Est-ce aux managers d’être sensibles aux possibles signaux d’usure professionnelle ?

C’est effectivement un vrai sujet. Bien sûr, on laisse sa vie personnelle quand on va travailler dans une entreprise, mais désormais tout est beaucoup moins hermétique. Et le télétravail a accéléré cette tendance. Les managers doivent donc être les premiers à être formés à cette évolution-là (ou même informés), pour prendre du recul et mieux comprendre les situations que peuvent vivre les salariés. En particulier pour les salariés aidants. La loi de 2013 a permis la reconnaissance du statut d’aidant, mais toutes les entreprises ne sont peut-être pas concentrées sur ce sujet.

La réforme aura-t-elle un impact sur la QVT des seniors ?

Faire de l’index senior [ndlr : le gouvernement propose la création à partir de novembre 2023 d’un “index seniors” afin de favoriser leur embauche et maintien en emploi dans les entreprises], c’est stigmatiser les salariés. A quel âge, peut-on considérer être senior ? C’est plus un état d’esprit qu’autre chose. Le sujet devrait plutôt porter sur la question de la valeur des personnes au travail.

Embaucher des plus de 55 ans car on bénéficie d’aides, c’est une rustine sur une jambe de bois, ce n’est pas cela qui changera le problème de fond. Doit-on s’interroger sur le coût du salarié qui a 35 ans d’entreprise ou sur ce qu’il a rapporté à l’entreprise ?

Les seniors sont des salariés fidèles, qui portent la culture d’entreprise, qui sont souvent plus empathiques vis-à-vis des dirigeants car ce sont des hommes et des femmes qui ont connu des pépins dans la vie : ils savent que leur employeur ne peut pas être le messie de tout, comme ils peuvent l’avertir de ses limites. Il y a un discours de vérité que l’on trouve davantage avec ces personnes qu’avec les plus jeunes. Le capital social d’un senior est très fort en entreprise.

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Diplômée en lettres modernes, Céline Tridon a suivi une formation en journalisme à l’IPJ. Elle y a confirmé son envie de travailler pour la presse écrite et web, souhait exaucé à travers la collaboration avec différents supports sur les thématiques « entreprise », « monde du travail », « management » et « RSE ». En 2023, elle reprend la rédaction en chef de My Happy Job.

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