Les violences conjugales, bien qu’ayant lieu dans la sphère privée, auront forcément des répercussions dans la vie professionnelle. C’est pourquoi les entreprises peuvent (et doivent, même) s’emparer de ce sujet, en restant sensibles aux signaux d’alerte. Explications avec Julie Vaccaro, psychologue clinicienne au sein de l’IAPR (Institut d’Accompagnement Psychologique et de Ressources).

Comment l’employeur ou le manager peut-il repérer qu’il y a violence conjugale ?

Julie Vaccaro : Il faut déjà savoir que les violences conjugales sont multiples. Souvent, on a l’image du coquard sur le visage. Néanmoins, ce n’est qu’une partie de ces violences, qui ne sont pas forcément visibles. Bien sûr il y a les violences physiques, mais aussi psychologiques, administratives, financières, sexuelles. C’est un panel très large.

Sur quoi, alors, se baser ?

Il faut rester attentif aux comportements inhabituels : une augmentation des retards, une irritabilité soudaine, des pleurs, etc. Soit des comportements qui ne sont pas habituels chez la personne et qui mettront la puce à l’oreille qu’il se passe quelque chose. Il est alors important de déclencher un entretien avec le ou la salarié(e), sans présumer de la cause, mais en exprimant une inquiétude. Car l’enjeu n’est pas de faire culpabiliser de tous ces comportements changeants ! Il faut laisser la personne s’exprimer et lui demander ‘pourrais-tu m’en parler ?’.

Comme il ne faut pas, non plus, présumer de ce qui pourrait être bon pour elle ?

Pour toute problématique professionnelle ou de santé « lambda », le réflexe serait de consulter le médecin qui, éventuellement, demanderait un arrêt de travail. Or, dans les violences conjugales, ce n’est pas forcément qu’il y a de mieux. La personne n’a peut-être pas envie d’être chez elle, puisque l’un des mécanismes des violences conjugales, c’est la mise à l’isolement. Et justement, là où l’entreprise peut intervenir, c’est en aidant la personne à sortir de l’isolement, en la soutenant, en la mettant en sécurité et en étant une ressource supplémentaire. C’est pourquoi il faut vraiment lui demander ce dont elle a besoin.

Quel est le rôle des collègues qui échangent au quotidien avec la personne concernée ?

C’est à tout à chacun, en tant que citoyen, de remarquer que quelqu’un ne va pas bien et de lui dire ‘j’ai remarqué que ça n’allait pas, est-ce que tu veux en parler ?’. Encore une fois, c’est toujours dans ce sens-là, car l’une des conséquence des violences conjugales c’est aussi de provoquer de la honte, de faire douter de soi, de se dire que ce n’est pas si grave et que peut-être on exagère, de penser que personne ne va nous croire… Or, le rôle des collègues, c’est de croire. Et, dans un deuxième temps, s’il y a plainte, de soutenir.

Les entreprises peuvent-elles se dire que cela relève de la sphère privée, que cela ne les concerne pas ?

Toute entreprise a un rôle de sécurité auprès de ses collaborateurs. Par ailleurs, lorsqu’on vit des violences conjugales, cela se transfère forcément sur le monde du travail (comme toute grosse problématique que l’on peut vive à l’intérieur de son foyer). Même si la personne concernée n’exprime rien, cela va rejaillir quelque part : dans la confiance que l’on a en soi, dans l’épuisement que l’on ressent, dans le temps que l’on dispose, etc.

Comme nous disions, l’entreprise a un rôle d’accompagnement, mais aussi d’orientation : vers le médecin du travail, vers les assistants sociaux, vers des psychologues ou des numéros verts, le 3919. Elles doivent apprendre à connaitre la problématique pour ensuite diffuser tout un travail de sensibilisation en interne, et notamment auprès des managers.

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Diplômée en lettres modernes, Céline Tridon a suivi une formation en journalisme à l’IPJ. Elle y a confirmé son envie de travailler pour la presse écrite et web, souhait exaucé à travers la collaboration avec différents supports sur les thématiques « entreprise », « monde du travail », « management » et « RSE ». En 2023, elle reprend la rédaction en chef de My Happy Job.

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