Accueillir un jeune en apprentissage ne s’improvise pas. Comme pour tout salarié, son on boarding soit être soigné. Ensuite, il s’agit de lui confier les bonnes missions afin qu’il s’épanouisse dans son travail. Enfin, accompagner un apprenti est aussi un bon moyen de s’initier au management. Explications avec Benoît Ledoux, ancien responsable formation et développement RH et co-auteur du Manuel pratique du tuteur en entreprise (Afnor éditions).

Existe-t-il des a priori ou des idées reçues sur le tutorat ?

Benoît Ledoux : Il y a toujours eu des idées reçues sur l’apprentissage. Souvent, l’apprentissage est associé à une image vieillotte, héritée du compagnonnage. Puisqu’il est davantage orienté vers des métiers manuels, on considère souvent qu’il est synonyme d’échec scolaire. Heureusement, depuis les réformes sur la formation professionnelle, les choses évoluent. De plus, grâce à une impulsion du gouvernement post-Covid, de nombreux contrats d’apprentissage ont été conclus pour conduire à des diplômes plutôt de type master ou BTS et ceci, davantage sur des filières de services que des filières industrielles ou manuelles.

Et concernant la relation tutoré/tutorant ? L’écueil est-il de la considérer uniquement comme un système descendant ?

Il ne faut pas croire que ces jeunes apprentis soient uniquement là pour combler un manque de main d’œuvre. Croire simplement que l’entreprise peut leur confier des tâches et qu’ils vont les exécuter, c’est limité.

L’ouvrage Manuel pratique du tuteur en entreprise propose une approche méthodologique qui repose sur deux dimensions : l’une pédagogique et l’autre managériale. Cela oblige l’entreprise à notamment anticiper l’arrivée d’un alternant et à s’interroger : comment se déroulera son intégration ? Sur quoi portera sa formation ? Quelles tâches, pertinentes, lui seront confiées ? Il s’agit aussi de fixer des étapes de suivi qui rythmeront le parcours d’apprentissage dans l’entreprise, mais qui permettront aussi d’anticiper les difficultés futures ou les succès futurs. De plus, en suivant l’évolution de l’apprenti, en suivant la progression de ses apprentissages, l’entreprise garde aussi un œil sur la production des résultats de performance. Ainsi, il faut proposer aux tuteurs managers d’anticiper des questions qui sont liées à la motivation, d’anticiper des notions qui sont liées à la compétence ou d’anticiper des notions qui sont liées à des problématiques, des situations personnelles.

Comme pour tout salarié, l’intégration est donc essentielle ?

Tout à fait. Une attention particulière doit être portée, car l’aspect notamment de gestion des compétences et de progression des apprentissages sera plus important encore qu’avec un salarié en poste. Cela prendra nécessairement plus de temps…

Et puis, il y a cette relation avec l’école, ainsi que l’alternance proprement dite qui suppose que le tutoré ne sera pas constamment dans l’entreprise. C’est pour cela que tous ces éléments imposent à l’entreprise de réfléchir à ses objectifs. Pourquoi recrute-t-elle un alternant ? Rien que de répondre à cette question, c’est déjà en soi une démarche d’anticipation. L’entreprise développe alors cette notion de scénario d’alternance.

Faut-il des compétences particulières pour être tuteur ?

Il faut faire attention, un jeune ne réagit pas comme un adulte qui a 30 ou 40 ans. C’est une autre personnalité à prendre en compte.

Dans mes fonctions, notamment de conseiller en RH, j’ai été amené à proposer à des collaborateurs de prendre ce rôle de tuteur justement pour s’essayer au management. Aussi, devenir tuteur, c’est d’abord être garant de ce cadre d’organisation que nous évoquions, de gestion et de conditions de travail.

Ensuite, la relation tuteur/tutoré peut s’établir essentiellement sur deux axes. Le premier :  il faut garder en tête qu’un apprenti vient pour apprendre et travailler. Au tuteur de savoir établir ce double impératif dans la vie de l’équipe. L’apprenti doit être intégré dans ce collectif, et qu’il acquiert aussi la compétence de vie en entreprise. Le deuxième axe, avant la recherche d’objectifs en particulier, c’est de permettre d’acquérir, au final, une certaine autonomie.

Entre tutoré et tuteur, c’est une relation très particulière qui se crée. Ce n’est pas de l’ordre parent-enfant, ni ami-ami, mais c’est quelque chose de spécial, où il y a de l’attachement.

Et à la fin du contrat d’apprentissage ? Comment anticiper le départ ?

Il faut se caler sur l’orientation qui est donnée par le ministère du Travail, à savoir la question de l’employabilité des jeunes. Ca incombe à l’employeur de participer à cette employabilité. L’apprentissage ne se limite pas uniquement à une production, il doit aussi participer à l’intégration sociale du jeune sur le marché du travail.

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Diplômée en lettres modernes, Céline Tridon a suivi une formation en journalisme à l’IPJ. Elle y a confirmé son envie de travailler pour la presse écrite et web, souhait exaucé à travers la collaboration avec différents supports sur les thématiques « entreprise », « monde du travail », « management » et « RSE ». En 2023, elle reprend la rédaction en chef de My Happy Job.

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