L’adaptation la plus réussie : c’est le prix qu’a reçu l’activité Eau de Veolia en France lors des Awards du bien-être au travail organisés par Bloom at work en fin d’année dernière. Le projet « Osons 20/20 » de l’entreprise promettait d’inverser la pyramide et de laisser davantage la possibilité de s’exprimer aux collaborateurs. Pari réussi ! Interview croisée de Jean-Charles Guy, directeur régional Centre-Ouest pour l’activité Eau de Veolia en France, en charge de l’animation du Comex délégué Leadership & Talent, et de Catherine Lasserre, directrice du développement RH et de l’innovation sociale.

Pouvez-vous nous expliquer le projet « Osons 20/20 » ?
Jean-Charles Guy. Veolia était une entreprise empreinte de pessimisme, il y avait donc une réorganisation à faire, il était nécessaire de remettre l’humain au cœur. Le Directeur général s’est fixé cette mission dans le projet stratégique 2017-2020 en faisant émerger le concept de pyramide inversée pour que chacun, au lieu de regarder la hiérarchie, se tourne vers ses collaborateurs, pour plus d’interactions et de services aux clients. Avec deux innovations majeures :

  • une organisation très simple, avec trois niveaux, 9 régions et 66 territoires, et surtout moins de silos ;
  • une pyramide inversée avec plus de confiance et un droit à l’erreur.

Catherine Lasserre. Il faut vraiment insister sur le contexte compliqué des dernières années : il fallait gérer le plan social et s’occuper des personnes qui partaient, et nous avons également cherché à donner de la fierté aux équipes. Tous les grands groupes écrivent des stratégies pour se moderniser et retrouver l’efficacité opérationnelle mais nous avons vraiment insisté sur la culture managériale et la pyramide inversée dans laquelle on considère que les sachants sont ceux qui sont en contact direct avec les clients.

Concrètement, qu’est-ce que cela change de travailler en pyramide inversée ? Comment se passe le quotidien ? Y a-t-il un avant-après ?
C.L. : Pour vous donner un exemple concret, autrefois, chaque directeur régional réunissait ses équipes pour échanger sur les sujets. Il décidait de la feuille de route et passait les sujets un à un. Désormais, l’ordre du jour est co-construit.

J-C. G. : En effet, dans ma région, j’organisais un séminaire une fois par an, seul. Maintenant, j’ai une équipe de volontaires qui s’en occupe, c’est beaucoup plus disruptif. Sur le terrain, on répond à des appels d’offres. Avant, l’équipe de développement s’en chargeait. Maintenant, tous les collaborateurs sont impliqués et ils vont même aux auditions défendre le dossier. Les régions et le national sont en appui. Sur la sécurité au travail, nous faisons de la sensibilisation pour que cela devienne un élément de fierté. Les collaborateurs prennent en main ces sujets. Avant, un salarié n’aurait jamais osé dire à son N+2 de ne pas rentrer sur une installation s’il n’avait pas l’équipement adéquat. Aujourd’hui, c’est le cas, le sujet est même devenu commun. Autre exemple : la stratégie était décidée au niveau Corporate et nous avions du mal à ce que chacun se l’approprie. Aujourd’hui, nous avons 66 projets de territoires avec des déclinaisons locales réelles. 560 services locaux vont même travailler par groupe de 10-12 personnes pour faire émerger des innovations et les tester. Cela créé un regain d’engagement.

Vous mettez aussi en avant le fait d’accepter les erreurs, de respecter le rythme de chacun. Les horaires ont-ils été modifiés ? Les managers, formés ?
J-C. G. : Sur ce volet Qualité de vie au travail, les négociations sont en cours. Nous avons déjà du télétravail et une charte sur les horaires de mails, mais nous ne pouvons pas en dire plus. Quant à la formation sur le droit à l’erreur, on a établi 10 principes du leader et le Comex national a fait plusieurs workshops car la démarche n’est valable que si le Comex est exemplaire. Ce n’est pas si simple de changer sa posture, d’accepter d’endosser les initiatives de ses collaborateurs quand elles ne sont pas heureuses. J’ai eu à le faire plusieurs fois, alors que je n’étais pas au courant de ces initiatives (alors qu’avant je demandais à être informé au préalable systématiquement). Ce n’est pas forcément agréable, mais cela permet que les propositions soient foisonnantes !

C.L. : Nous devons désormais rationaliser les idées car les collaborateurs jouent le jeu et sont de vraies forces de propositions. Pour cela, en région, nous aiguillons les personnes pour former des petits groupes qui travaillent en collaboration et avec l’objectif qu’une fois l’idée développée nous pouvons faire du copier-coller entre territoires.
J-C. G. : On a formé beaucoup de personnes aux techniques d’intelligence collective. Des facilitateurs participent aux réunions de chantier et ce ne sont plus les maîtres d’ouvrages ou les directeurs régionaux qui gèrent tous les sujets.

Depuis la mise en place de ces principes, en janvier 2018, quels résultats constatez-vous au niveau du bien-être des collaborateurs ?
C.L. : Les enquêtes d’engagement ont montré des résultats probants et au-delà de ça, on constate que les gens nous rejoignent, ce qui montre l’attractivité externe. On a aussi des taux d’engagement plus forts. L’an dernier, nous avons par exemple lancé un challenge interne et externe pour faire remontrer des idées sur la QVT. On s’attendait à avoir une centaines de bonnes pratiques. On a eu un nombre largement supérieur, avec de nombreuses participations de start-up : un signe que l’entreprise attire. Les écoles et universités reviennent aussi vers nous car la transformation que l’on est en train d’opérer en interne les intéresse. Veolia s’est dépoussiérée : l’entreprise correspond de mieux en mieux aux codes attendus désormais, notamment par les Millenials.

Ce regain d’engagement permet aussi d’améliorer la marque employeur, de fidéliser les équipes et in fine d’accroitre la performance du groupe…
C.L. : Nous avons fait des films pour valoriser nos métiers et nous n’avons eu aucun mal à trouver des collaborateurs volontaires : ce sont des signes. Quand on n’est pas bien dans une entreprise, on ne répond pas présent !
J-C. G. : L’activité sur les réseaux sociaux montre aussi que les collaborateurs utilisent leur compte personnel pour relayer des informations de l’entreprise sur nos métiers et notre raison d’être. Notre volonté d’agir comme partenaire du climat rejoint aussi une recherche de sens personnelle et sociétale. Ces enjeux globaux, qui dépassent l’entreprise, permettent de redonner du sens, et de la fierté.

L’info en plus extraite du Guide des meilleures pratiques RH réalisé par Bloom at Work à l’issue des Awards du bien-être au travail 2019 :

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Titulaire d’un master de journaliste au Celsa (Paris), Lucie Tanneau est journaliste indépendante, sillonnant la France, et plus particulièrement l’Est de la France au gré des thèmes de ses articles. Elle collabore à de nombreux titres, de Liaisons sociales magazine, La Vie, et Okapi, en passant par Grand Est, l’Est éclair, Village, et Foot d’Elles.

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