Agir sur son travail pour y trouver plus de sens, tel est l’objectif du job crafting. La méthode n’est pas nouvelle, mais elle connait depuis un peu un véritable essor. Forcément, en ces périodes de recherche de sens au travail, elle permet de prendre sa vie professionnelle en main… à condition d’avoir bien défini en amont ses besoins du moment. Explications avec Anaïs Georgelin, CEO et fondatrice du cabinet de formation managériale SomanyWays.

Quelle est votre définition du job crafting ?

Anaïs Georgelin : Concept reconnu scientifiquement et qui a un impact sur le bien-être au travail, le job crafting, c’est l’art de façonner son travail pour lui donner plus de sens. C’est un comportement naturel qu’adoptent un certain nombre de collaborateurs et qui peut être encouragé, accompagné et développé.

Le job crafting permet d’agir sur trois dimensions : sur ses tâches au quotidien (qu’est-ce que je fais ?), sur ses relations interpersonnelles au travail (comment est-ce que je peux améliorer mes relations avec mes collègues, est-ce que je manage mon manager ?) et sur son organisation du travail (quels sont mes horaires, est-ce que je souhaite davantage de télétravail ou non, est-ce que je préfère travailler en open space ou dans une salle fermée, etc.). En somme, ce sont tous les petits ajustements que l’on peut faire dans son poste actuel.

Comment identifier ces ajustements ?

La première étape consiste bien sûr à réfléchir à ce dont on a besoin. On lit beaucoup que les collaborateurs cherchent du sens au travail. Ils ont des aspirations mais, en réalité, quand on creuse un peu, on se rend compte que les salariés ne sont pas conscients de ce qu’ils veulent vraiment. C’est pour cela que la première étape, c’est d’identifier ses attentes prioritaires. Ensuite, il s’agit d’évaluer si ces besoins sont satisfaits ou pas. Par exemple, inutile de s’interroger sur ses horaires de travail, si ce n’est pas un sujet pour soi.

Et si on n’est pas satisfait sur certains critères ? Il faut pouvoir identifier des actions concrètes pour pouvoir améliorer la situation. Sachant que le job crafting s’envisage aussi dans le cadre d’échanges et de rituels managériaux ! Le manager doit être impliqué pour aider le collaborateur à mieux dimensionner ces ajustements, l’objectif étant aussi que cela ne nuise ni à l’équipe ni à l’entreprise.

Quelles sont les conditions de succès du job crafting ?

L’entretien annuel peut être l’occasion pour le collaborateur de partager son bilan et de s’exprimer sur ce qui va bien ou moins bien. En préparant correctement cet entretien, il peut alors soumettre des pistes de solutions. En miroir, le manager doit être formé pour savoir comment se positionner et pouvoir répondre au mieux au collaborateur. Il peut avoir des difficultés à accéder positivement à la demande de son collègue. Mais il ne faut pas pour autant balayer le sujet ! De même, le manager peut être à l’initiative d’un entretien informel, s’il repère des signaux faibles.

En somme, il faut qu’il y ait une responsabilité partagée : que l’on donne des clés aussi bien au collaborateur qu’au manager. D’ailleurs, le piège serait de laisser croire au collaborateur que tout est possible. Après tout, on reste dans un collectif quand on évolue dans une entreprise. A contrario, l’autre piège, c’est de ne pas accompagner les lignes managériales pour savoir quelle posture adopter. Face à la requête de son collaborateur, le manager peut se sentir dépossédé, craindre de perdre une partie de son « pouvoir ».

Le job crafting revient-il donc à dire que l’on reprend le contrôle de sa vie professionnelle ?

Complètement. On devient acteur de son travail. C’est un vœu pieux depuis plusieurs années, où on répète l’injonction aux salariés d’être acteurs de leur formation, de leur parcours… Or, il ne suffit pas de le dire, il faut donner les moyens ! Et c’est ce que le job crafting, quand on l’outille, permet de résoudre.

Ces comportements nécessitent-ils d’être suivis dans le temps ?

Job crafter, ce n’est pas toujours facile ni immédiat : on ne trouve pas forcément la bonne solution du premier coup. Par définition, le job crafting est itératif et demande à ce qu’on ait plusieurs espaces où exprimer des questions auprès de son manager. De plus, dans le temps, les besoins évoluent. Cela peut alors valoir le coup de dresser un nouveau bilan.

Le phénomène n’est pas nouveau, mais il devient une tendance forte. Pourquoi ?

Car il n’y a jamais eu autant de démissions ou de « quiet quitting », de désengagement de la part des salariés. Ces derniers veulent autre chose, ils parlent sans cesse de sens au travail : le contexte RH est donc relativement tendu. Or, le job crafting a un impact tant au niveau du collaborateur (réduction du stress, des burn out, amélioration de l’épanouissement au travail, du pouvoir d’agir, etc.), qu’au niveau du collectif (moins de conflits, davantage de coopération) et de l’entreprise (amélioration de l’engagement et de la performance, réduction du turn over…). Sans oublier l’impact sur la Société, qui subit toujours les importants coûts de santé liés aux problèmes de mal-être au travail… Enfin, le job crafting, c’est être capable de rebondir, d’ajuster sa fiche de poste. Cela signifie qu’un candidat est en mesure de s’adapter à un monde du travail changeant. Développer les comportements de job crafting contribue à l’employabilité.

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Diplômée en lettres modernes, Céline Tridon a suivi une formation en journalisme à l’IPJ. Elle y a confirmé son envie de travailler pour la presse écrite et web, souhait exaucé à travers la collaboration avec différents supports sur les thématiques « entreprise », « monde du travail », « management » et « RSE ». En 2023, elle reprend la rédaction en chef de My Happy Job.

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