Quels enseignements peut-on tirer du premier confinement pour les semaines à venir ? La révolution du télétravail va-t-elle être durable ? Sylvie Peretti, DRH de Generali, nous explique les différentes mesures prises dans l’entreprise depuis le début de l’année pour veiller au bien-être et à la santé des salariés tout en leur permettant de bien travailler, même à distance.

Avant la crise du Covid-19, où en étiez-vous avec le télétravail ?
Sylvie Peretti. Les grèves de 2018 et de 2019 nous avaient permis de faire des tests grandeur nature ! Au pic du mouvement, nous avions 60% de nos collaborateurs en télétravail. Quasi tous y étaient un à deux jours par semaine. Cela avait bien fonctionné, notamment en matière de logistique et d’informatique. Au-delà de ces deux périodes, les ordonnances Macron ont permis d’assouplir le télétravail et donc de faciliter les demandes.

 

Comment s’est passé la période du premier confinement ?
S.P.
Nous avons tous basculé en télétravail en seulement deux jours. Les équipes RH et informatiques ont été très sollicitées pour que tous les salariés aient les bons outils rapidement. Certaines équipes ont dû être équipées en urgence : nous avons envoyé des ordinateurs, des doubles écrans, des galets pour ceux qui n’avaient pas de wifi… Il y a eu un gros travail de logistique, mais aussi d’écoute des salariés avec une hotline des RH pour répondre à leurs interrogations et leurs demandes. Cela les a beaucoup rassurés, nous ne voulions pas qu’ils se sentent seuls. Nous avons mis en place une cellule de crise avec les services de l’environnement de travail, des RH, de la communication interne, de la direction informatique… Nous étions en lien quotidiennement, parfois matin et soir ! Le Comité exécutif se réunissait le midi pour valider les décisions prises par la cellule de crise. La coordination a été très forte : la communication a été une clé de ce dispositif.

Concrètement, comment cela s’est-il traduit ?
S.P. Nous avons beaucoup communiqué auprès des salariés, des partenaires sociaux et des managers. Nous avions une réunion par semaine avec notre Top 100, chaque direction était ensuite en contact avec sa ligne managériale très régulièrement pour transmettre les informations et les décisions du Comex, et chaque manager faisait au minimum un point par semaine avec son équipe. Cela a fonctionné en cascade, un peu comme les Poupées russes. Pour les managers de proximité, notre consigne était claire : capter les signaux faibles dans l’équipe et maintenir des liens. Il y a eu ainsi beaucoup de moments de convivialité par Teams et Whats’App : des cafés, des concours photos, des afterworks virtuels… Notre communication interne a aussi imaginé une newsletter feelgood, un journal des bonnes nouvelles envoyé tous les vendredis avec, par exemple, les initiatives solidaires prises par nos agents. Cette initiative a été très appréciée et a fait du bien dans un climat anxiogène. Nous avons aussi mené des enquêtes auprès des salariés et des managers pour qu’ils puissent s’exprimer par rapport à leur vécu : nous voulions savoir comment ils allaient, avoir leurs ressentis et préparer le déconfinement. A l’issue de la première période de confinement, nous avons eu un très fort taux de satisfaction : 93% des salariés estiment avoir été bien accompagnés par leurs managers. Ces derniers ont été très contents d’avoir de tels feedbacks, c’était très valorisant.

Qu’avez-vous mis en place pour le déconfinement ?
S.P. Il a fallu rassurer les salariés et leur montrer que les conditions étaient réunies pour leur retour, même partiel, au bureau. Nous avons réalisé un film pour expliquer la nouvelle organisation et les nouvelles règles de vie dans les bureaux. Notre Président-Directeur Général a prononcé un discours de bienvenue dans les locaux. Chaque salarié s’est vu remettre un kit avec des masques, du gel hydro alcoolique, un clavier et une souris. Ils se sont vraiment sentis accueillis. Nous sommes en flex office : là où les salariés étaient 6, ils sont 3 désormais pour respecter les distances. Nous avons fait des expérimentations à la cafeteria avec des roulements et des espaces ouverts à tour de rôle pour pouvoir les nettoyer, etc. Et nos locaux ont été audités par un cabinet indépendant pour valider toutes les mesures sanitaires. Leurs conclusions étaient très élogieuses du dispositif que nous avions mis en place.

 

Quel rythme de télétravail aviez-vous choisi à la rentrée en septembre ?
S.P. Nous avions choisi de maintenir deux jours minimum sur site par semaine afin de garder le lien social et une dynamique collective. De manière générale, je dirais que le business as usual fonctionne bien à distance, mais pour des projets complexes demandant des interactions, des groupes transverses, il est difficile d’innover et d’être créatif en étant 100% en télétravail. Nous étions au début des renégociations de nos accords de télétravail juste avant le premier confinement, nous avons décidé de les reporter à fin octobre pour prendre un peu de recul par rapport à ce que nous venions de vivre. Avant, le télétravail était un mode de fonctionnement spécifique, aujourd’hui nous nous orientons vers un modèle hybride pour l’avenir, le télétravail et le présentiel sont durablement imbriqués, le télétravail n’est plus une variable d’ajustement. Nos réflexions portent désormais sur ce que l’on fait en présentiel : pour quoi venir au bureau ?

Avec le reconfinement, quels vont être vos points de vigilance pour les semaines à venir ?
S.P. Nous avons rebasculé tous nos collaborateurs administratifs en télétravail. Pour nos réseaux commerciaux, cette fois-ci, nous avons pris la décision de les laisser sur le terrain en respectant scrupuleusement, bien entendu, les mesures sanitaires. Nous sommes particulièrement attentifs aux personnes psychologiquement fragilisées par la première période de confinement. Nous maintenons un dialogue étroit avec nos partenaires sociaux et nous avons réactivé la même cellule de gestion de crise qu’au premier semestre. Pour nos salariés, une cellule d’écoute et de soutien psychologique spécifique est ouverte depuis le début de l’épidémie. Nous venons de fortement sensibiliser notre Top 100 sur la vigilance accrue qu’il convient d’avoir avec la ligne managériale pour permettre aux salariés fragilisés d’accéder selon des modalités précises à nos bureaux pour ne pas se sentir trop isolés et garder un lien, même ponctuel ,avec quelques collègues et leur manager en présentiel selon une cadence à définir (hebdomadaire, mensuelle…). Nous sommes également vigilants à ce que les nouveaux embauchés et particulièrement nos jeunes alternants qui viennent d’arriver puissent trouver leur place et s’intégrer dans de bonnes conditions dans notre collectif.

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Diplômée de Sciences-Po Paris, Fabienne Broucaret a fondé My Happy Job en 2016. Elle en a été la rédactrice en chef jusque fin 2022. Conférencière et journaliste, elle a écrit "Mon Cahier Happy at Work" (Solar) et "Télétravail" (Vuibert). Elle a aussi co-écrit “2h chrono pour déconnecter (et se retrouver)” avec Virginie Boutin (Dunod). Passionnée par les questions de mixité, elle est enfin l’auteure des livres "Le sport, dernier bastion du sexisme ?" et "A vos baskets toutes ! Tour de France du sport au féminin" (Michalon).

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