« Je me sens déboussolée… Pendant deux mois, j’ai travaillé chez moi, et je dois retourner au travail. Quand je suis arrivé lundi matin, mon patron m’a donné les nouvelles règles, encore plus strictes qu’avant le confinement. Puis a réorganisé le travail. Puis a mis la pression à tous « pour sauver l’entreprise ». Puis… nous a laissés nous débrouiller. Pas un bonjour. Pas un sourire. Pas un moment pour échanger sur comment je me sentais, savoir comment c’était, de ne pas être là pendant deux mois. Moi, j’avais envie d’arriver, de prendre un café, et j’avais des idées. J’ai l’impression de ne pas exister. Tant pis, au boulot ! ».

Voilà comment Françoise a repris le travail. Elle n’est pas la seule. Alors, écoutez… Business as usual, c’est fini. Tout bascule depuis trois ans ou plus. Les marchés fragiles. Le changement climatique qui s’accélère. La pandémie. Les peurs nous animent et nous invitent à entrer en pilotage automatique, renforcer nos egos et penser comme une machine. Il faut sauver l’entreprise ? Sauvons-là tous ensemble. Avec Françoise. Avec les autres.

Ce qui se déroule aujourd’hui est un signal fort nous invitant à repenser la relation que nous avons avec nous-même, ceux qui nous entourent, ce qui nous entoure. Nous avons l’opportunité formidable de voir que nos intérêts individuels sont reliés à ceux des autres, que nos intérêts d’entreprise sont reliés à ceux du monde. Nous pouvons revisiter nos rôles, nos postures, nos habitudes. Si quelque chose doit changer, c’est notre relation aux autres, à la vie, au monde.

Revoir notre façon de vivre et de vivre l’entreprise

La pandémie est une invitation à revoir en profondeur la façon dont nous voulons vivre en considérant avec humilité que tout ce que nous avons reçu depuis notre éducation d’enfant a été formaté par l’ego : dominer, réussir, comparer, être en compétition, le 1er. Nous avons appris à conjuguer notre vie en « JE ». Nous n’y pouvons rien !

Arrêtons-nous un instant : dans cet espace, nous pouvons peut-être reconnaître que cela influence tous nos actes quotidiens, en tant qu’humain, en tant que chef d’entreprise ou manager. Que nous le vouions ou non, à différents degrés, à différentes intensités.

Le temps qui vient : celui du « nous »

Le temps qui vient sera celui de l’écoute :

  • S’écouter soi, sa conscience intérieure, aller vers un chemin juste. Tout part de soi !
  • Écouter l’autre, ses aspirations, ses besoins, ses élans et ses rythmes
  • S’écouter ensemble, nos envies, nos intentions, nos actions, nos contributions.

Nous sommes tous contributeurs, et si nous souhaitons que Françoise contribue, alors, elle doit être écoutée profondément. C’est une action de pleine conscience.

Parce que Françoise, elle, réalise qu’il y a d’autres façons de voir, de faire, de vivre. Elle a envie d’une vie plus apaisée, joyeuse. Elle a envie « d’ensemble ». Elle a envie de participer à une œuvre commune. Elle a aussi envie de soulager ses tensions, ses peurs, ses émotions. Françoise a besoin d’espace. Peut-on un moment le lui offrir ?

Cet espace, c’est le « nous ». Et là, elle peut avoir des idées pour contribuer encore plus et mieux. Françoise, comme nous toutes et nous tous, avons besoin d’espace.

Ce lundi matin, écouter Françoise, c’est soutenir l’entreprise entière. Écouter Françoise, c’est amener une contribution positive à sa vie et à la mienne. Écouter Françoise, c’est offrir la possibilité à chacun de s’engager plus fort dans la relation, dans le travail, dans l’entreprise. Écouter Françoise, c’est servir la vie et le monde.

Deux exercices pour s’entraîner

  1. S’écouter

Asseyez-vous quelques minutes, juste avec vous-même. Et laissez venir en vous une question : si je créais cette entreprise aujourd’hui, je ferais comment ? Qu’est -ce qui serait important pour moi ? De quoi aurais-je besoin pour réussir ? Quelles sont mes aspirations d’humain dans ce projet ? A qui j’aimerais contribuer ?

Laisser venir librement les réponses, sans hiérarchiser. Laisser-vous ressentir les réponses.

Après quelques instants en silence, prenez une feuille et noter tout ce qui vous vient à l’esprit, là aussi sans hiérarchiser ni éliminer quoi que ce soit. Notez tout… Comment vous sentez-vous avec cette liste ? Y-a-t-il une direction, une action qui pourraient nourrir vos besoins ?

  1. Écouter l’autre

L’intention de cette pratique est de se mettre réellement à l’écoute de soi et de l’autre.

Deux personnes s’installent face à face (disons A et B). Nous prenons un temps de « contemplation », c’est à dire nous faisons revenir une situation particulière (un moment de tension entre collègues, un moment de joie partagée, un moment de satisfaction professionnelle, un moment de stress en réunion…). Lorsque la situation est revenue à l’esprit, nous demandons ce qui a été ressenti dans le corps, ce qui a été pensé, y avait-il une émotion, comment était-elle ressentie…

Puis les deux personnes ouvrent les yeux et A partage à B l’expérience de cette situation (la réponse aux questions posées précédemment, sans entrer dans le contenu de la situation) et B écoute en silence sans réagir (ni mots, ni non verbal). 3 minutes (en général) après, nous inversons, B partage à A son expérience d’une situation à A, et A écoute sans réagir.

Dans un troisième temps, les deux personnes sont invitées à échanger sur l’expérience de l’écoute : qu’est-ce que cela fait d’être écouté sans réaction ? Nous sommes nous sentis écoutés ? Qu’est-ce que cela fait d’écouter sans réagir ? Comment est l’écoute ? Qu’est-ce qui est ressenti durant ce temps ? Quel est le besoin d’écoute ?

Il y a des variantes à cette pratique, comme par exemple à la fin de chaque partage, la personne qui écoutait restitue à l’autre ce qu’elle a entendu, et celle qui partageait confirme ou modifie la restitution, puis un temps d’échange sur le partage et l’écoute.
On peut utiliser cela au quotidien, comme un rituel.

Cet article est extrait de notre hors-série sur les leçons de la crise. Pour le télécharger gratuitement : https://www.myhappyjob.fr/hors-serie/

Au sommaire : Télétravail, management à distance, quête de sens, prévention des RPS et burn-out… Ces huit semaines de confinement nous ont beaucoup appris individuellement et collectivement. Quels enseignements peut-on déjà en tirer ? Comment se réinventer ?

Vous y trouverez des conseils, des tendances, des pistes de réflexions et d’actions, mais aussi des partages d’expériences.

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Stéphane Nau est instructeur MBSR et fondateur de Comment ça va ?

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