Lire un dossier écouteurs sur les oreilles ou enlever son casque pour répondre au téléphone… Deux attitudes que l’on a tous déjà eu au travail. Mais est-ce vraiment bénéfique de travailler en musique ? Aide à la concentration ou distraction supplémentaire ? Nous avons interrogé Hervé Platel, professeur de neuropsychologie à l’université de Caen et reconnu internationalement pour ses travaux sur la neuropsychologie de la perception musicale.

Vous avez étudié les bienfaits de la musique sur le cerveau, qu’en est-il au travail ?
D’un point de vue scientifique, les études montrent que l’on ne mémorise pas forcément mieux en musique. Cela dépend des habitudes : il y a des gens qui sont gênés par la musique pour encoder des informations alors que, pour d’autres, elle apporte un avantage en termes de concentration. Elle les aide à créer une bulle. La musique peut être une aide, mais il n’y a pas de vérité ! Cela dépend des profils, mais aussi du moment où l’on écoute la musique. Ecouter un morceau stimulant avant de travailler peut aider à la réalisation de tâches en donnant un coup de boost. Exactement comme pour les sportifs qui s’en servent pour se concentrer et oublier la douleur. La musique libérant des endorphines et de la dopamine, on peut en profiter en cas de coup de mou ou de lassitude au travail.

N’y a-t-il pas un risque de se déconcentrer ?
C’est possible, mais cela dépend, là encore, des individus. Les jeunes générations ont toujours été habituées à faire plusieurs choses à la fois. Nous n’avons pas le recul nécessaire pour savoir si cette stimulation sensorielle les aide ou non. On sait par contre que les personnes qui ont fait de la musique seront plus facilement déconcentrées car elles chercheront à décortiquer et analyser le morceau.

Y a-t-il des musiques plus propices que d’autres à la concentration et à la productivité au travail ?
Il y a une constante : à partir du moment où votre tâche n’est pas répétitive et a besoin du langage, toute autre stimulation langagière va vous distraire davantage qu’une stimulation instrumentale. Donc pour travailler, mieux vaut rester sur de l’instrumental ou sur des chansons dont on ne comprend pas les paroles. Après, la nature de la musique choisie dépend de chacun : en général une musique connue est préférable car elle permettra de se couper des conversations environnantes sans nous inciter à nous concentrer pour découvrir ce nouveau son. Pour diminuer le stress, une musique connue, agréable et au tempo plutôt lent, avec une orchestration peu chargée, semble plus adaptée.

Le cerveau ne risque-t-il pas de saturer à toujours faire deux choses à la fois ?
Ce n’est peut-être pas la saturation cérébrale qui est à craindre, mais plutôt la difficulté à se concentrer sur une tâche unique. Mais il n’y a pas d’étude là-dessus. Je pense que cela va poser un problème au niveau de la mémoire et de l’acquisition des connaissances, mais tout le monde ne réagit pas de la même manière.

Et vous, votre playlist au bureau, c’est quoi ?
Moi, je n’écoute pas de musique en travaillant ! Car je suis musicien et je suis vite capté par la musique. Avec Vivaldi ou Bach, assez neutres en terme instrumental, j’arrive à peu près à me concentrer. Cette légère stimulation classique peut m’aider en fin de journée quand je suis fatigué, mais sinon, je ne suis pas un bon sujet !

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Pour aller plus loin : Lechevalier B., Platel H., Eustache F., Le cerveau musicien, De Boeck Université, 2010

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Titulaire d’un master de journaliste au Celsa (Paris), Lucie Tanneau est journaliste indépendante, sillonnant la France, et plus particulièrement l’Est de la France au gré des thèmes de ses articles. Elle collabore à de nombreux titres, de Liaisons sociales magazine, La Vie, et Okapi, en passant par Grand Est, l’Est éclair, Village, et Foot d’Elles.

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