Le flex office, avec ses bureaux partagés et sa gestion agile des espaces, s’impose comme une solution tendance pour conjuguer optimisation et qualité de vie au travail.
Chaque matin, Pauline arrive au bureau sans savoir où elle va s’installer. À sa disposition : des espaces ouverts pour collaborer, des bulles isolées pour se concentrer ou des salons informels pour échanger. Loin d’être le décor d’un film futuriste, le quotidien de Pauline est celui d’une poignée de salariés d’entreprises de l’Hexagone qui ont franchi le pas du flex office. Car, selon l’étude Kardham Parcours Urbains*, au niveau européen, la France est le pays où l’on trouve le plus de répondants bénéficiant encore d’un poste attitré, avec seulement 16 % de salariés travaillant en flex office. Un chiffre qui grimpe à 26 %, selon une étude de JLL.
Sienna Investment Managers (Sienna IM) a réuni il y a quelques mois ses 150 collaborateurs français dans le même bureau en faisant la part belle au flex office avec un ratio de 0,7, soit 7 postes de travail pour dix salariés. L’objectif affiché ? “Être plus accessibles les uns pour les autres pour se connaître, coopérer, favoriser la spontanéité et les small talks et renforcer la culture d’entreprise. C’est la clé du développement”, liste Jean-Baptiste Lagier, responsable de la stratégie qui a coordonné le projet d’aménagement de l’entreprise. Selon Mehdi Dziri, directeur général d’Ubiq, spécialisé dans la recherche de bureaux en France, la moyenne observée dans la pratique du flex office est de six postes pour dix collaborateurs. Même au pic de présence des salariés, entre les vacances, le télétravail, les RTT et les missions de terrain, “le taux d’occupation d’un poste de travail individuel est en moyenne de 50 %”, commente Camille Rabineau, fondatrice du cabinet de conseil Comme On Travaille.
Avant d’ajouter qu’il existe une grande variété de situations : “Passer en flex office ne signifie pas forcément réduire le nombre de postes, mais plutôt introduire de la souplesse dans les usages de l’espace.” Précurseur sur le sujet, le cabinet Centaure Avocats (70 collaborateurs) pratique le flex office depuis une quinzaine d’années. “Avec des taux d’occupation effectifs très faibles, inférieurs à 20 % de nos bureaux, le nomadisme étant dans notre ADN d’avocats, nous avons rationalisé l’occupation des espaces”, témoigne Yves Claisse, fondateur et gérant associé du cabinet. Une rationalisation toujours bienvenue quand on sait que le coût d’un poste de travail est “de l’ordre de 13 000 euros par an”, rappelle Mehdi Dziri. Avant de préciser : “C’est la deuxième ligne du compte de résultats.”
Casser les habitudes
Subsistent néanmoins certains freins, et notamment l’inconfort, décrié par les salariés. Camille Rabineau reconnaît que, selon les études, l’indice de QVT serait meilleur chez les collaborateurs qui auraient des bureaux attribués par rapport à ceux en flex office (5,9 contre 4,6 dans l’étude Parcours Urbains). Pour éviter le sentiment de déclassement inhérent à ce changement d’organisation, et ne pas compromettre le bien-être de salariés farouchement attachés à leurs habitudes, les entreprises ont intérêt à aménager des espaces agréables et accueillants. Camille Rabineau recommande de “coconcevoir les espaces avec les salariés pour qu’ils y apportent leur touche personnelle” afin de pallier “la perte de repères et l’absence de personnalisation des bureaux, qui constituent des éléments de sécurité psychologique au travail”. Elle conseille ainsi de définir des zones personnalisées par équipe “pour créer des points d’ancrage pour les collaborateurs et apporter une âme et une identité d’équipe”.
Objectif ? “Garder des espaces à taille humaine et permettre de retrouver les collègues que l’on connaît, tout en créant de nouveaux dynamismes”, renchérit Quentin Audrain, cofondateur de Yemanja, qui accompagne les entreprises dans l’aménagement de bureaux. De toute évidence, pour que le passage au flex office fonctionne, il doit être mené de concert avec les équipes. Il convient d’échanger avec les collaborateurs en amont, de comprendre leurs attentes et de les consulter sur l’organisation des espaces pour qu’ils puissent s’approprier le projet. “En échangeant sur le sujet, les collaborateurs comme les dirigeants ont vite perçu les vertus du flex office, et notamment la possibilité de pouvoir interagir les uns avec les autres de manière immédiate et informelle”, justifie Jean-Baptiste Lagier.
Repenser les usages
Deuxième recommandation : aménager les espaces selon les usages de travail. “Il faut travailler sur l’aspect “vases communicants”, en proposant de nouveaux espaces et services”, conseille Camille Rabineau. Pour Mehdi Dziri, c’est l’occasion d’optimiser les postures de travail avec des zones de travail adaptées. La clé ? Imaginer différents espaces pour satisfaire les besoins des collaborateurs : un open-space avec de petites zones délimitées d’une dizaine de bureaux, des espaces collaboratifs permettant de se réunir en groupe pour travailler en mode projet, des salles de réunion fermées, des cabines acoustiques, des bureaux en hauteur pour le travail créatif, des salles de silence et des espaces de détente… Centaure Avocats va même plus loin, en proposant des espaces modulables et des espaces atypiques pour accueillir collaborateurs et clients : un espace “speak easy”, une salle de musique, une brasserie… Yves Claisse insiste ainsi sur la nécessité de rendre le flex office “attractif et non répulsif”.
Pour Quentin Audrain, une des clés de réussite est d’“apporter de la diversité dans les espaces via de multiples espaces supports pour travailler autrement”. Ainsi, au-delà de la rationalisation économique, l’objectif visé est de “maximiser le confort et la productivité des salariés”, prévient Mehdi Dziri. Quentin Audrain ne dit pas autre chose : “L’endroit où l’on travaille doit être adapté au travail que l’on doit faire.” Néanmoins, selon l’étude “The rise and rise activity based working” de Leesman, un tiers des collaborateurs seraient des “squatteurs”, restant sédentaires avec des difficultés à bouger. “L’enjeu est de travailler sur les routines et de les aider à adopter la mobilité”, glisse Camille Rabineau. Dernier conseil : prôner l’exemplarité. C’est ce qu’ont fait les dirigeants de Sienna IM en s’appropriant pleinement le flex office. “Il faut appliquer les mêmes règles pour tout le monde”, prévient Jean-Baptiste Lagier. Chez Sienna IM, dirigeants et collaborateurs sont ainsi logés à la même enseigne.
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