A l’heure où un salarié sur deux est en situation de détresse psychologique, il est plus que jamais nécessaire de protéger sa santé psychique. Voici quatre clés d’hygiène mentale à mettre en place pour un quotidien professionnel plus serein et épanoui.
Savoir se ressourcer
Dans un monde accéléré, régi par le toujours “plus”, difficile de ne pas se sentir stressé, submergé, sans cesse en train de courir. Sans un vrai répit ni un véritable repos, le travail, censé être “bon pour la santé” peut rapidement devenir délétère, surtout s’il finit par prendre toute la place dans nos vies. “Il faut être au clair sur nos attentes vis-à-vis de lui : quel temps, quelle énergie y met-on ? Qu’en retirons-nous ? Il ne peut pas être tout, prévient Christophe Nguyen, psychologue du travail et fondateur du cabinet Empreinte humaine. Il est important de diversifier ses sources d’investissement, on n’a pas à culpabiliser d’avoir une vie.” Au contraire ! Nos hobbies, ces activités qui nous plaisent vraiment – jouer du piano, jardiner, randonner, faire du vélo… – et que nous sacrifions parfois par manque de temps ou d’énergie, sont justement celles qui vont nous permettre de nous régénérer.
“C’est la différence entre repos et ressourcement, commente Noémie Guerrin, préventrice et consultante experte santé mentale au travail et risques psychosociaux. Le repos, c’est du temps passif, de sommeil, de sieste, de détente, de pause, qui va rétablir notre énergie de base. C’est vital, mais cela ne nourrit pas le moral et ce n’est pas suffisant quand on est confronté à une fatigue existentielle, émotionnelle ou une perte de sens.” À l’inverse, les activités qui nous nourrissent profondément nous permettent de nous ressourcer, de nous reconnecter à nous-même et de retrouver de l’énergie : “Ce sont des temps vivants qui donnent de la perspective, réparent en profondeur, et permettent de gagner en lucidité surtout quand on est manager. À condition que l’activité soit personnalisée, qu’on y soit actif et engagé. C’est l’inverse du ‘il faut que j’aille courir’, qui n’engage pas du tout, et que l’on fait en pensant à sa to do-list ou à l’appel à la baby-sitter.”
S’intéresser à sa santé mentale
“Un esprit sain dans un corps sain”, disait Montaigne. Nous le savons tous : bien manger, bien dormir, avoir une activité physique régulière sont la clé de notre bien-être. Bouger régulièrement et pratiquer un sport protège du stress, de l’anxiété et des symptômes dépressifs, selon la HAS (Haute Autorité de santé). Mais, si nous savons comment être en bonne santé physique, combien d’entre nous savent comment être en bonne santé mentale ? “On préfère d’ailleurs parler de développement personnel et de recherche du bonheur, note Christophe Nguyen. De nombreuses personnes ne savent pas faire, se disent qu’elles vont bien.” Et négligent les signaux faibles. “Il est important d’apprendre comment la santé mentale fonctionne, estime Noémie Guerrin. Ce n’est pas une question de faiblesse, mais de ressources. Avoir une culture de base permet de mieux comprendre et de mieux agir : je sais quand je suis bien dans mes baskets et je sais, quand je rencontre une contrainte, comment la dépasser. C’est une hygiène de vie, comme se brosser les dents. C’est fondamental pour arriver à jongler un peu mieux avec ce qui peut nous arriver, reprendre du pouvoir sur nos vies et ne plus subir.”
S’autoriser à parler de soi
“Et toi, ton weekend ?” Scène classique de bureau autour de la machine à café. “Nos vies privées sont embarquées dans l’énergie du jour au travail, on passe nos journées à en parler à nos collègues”, décrypte Claire Le Roy-Hatala, intervenante en santé mentale et travail et docteure en sociologie des organisations. Mais il nous est plus difficile de nous autoriser à dire quand nous allons moins bien. “On se dit souvent que les préoccupations des uns et des autres vont prendre toute la place si on les laisse trop s’exprimer, continue-t-elle. Mais c’est l’inverse : s’autoriser, et en tant que manager autoriser ses équipes à partager leurs fragilités et leurs besoins, à dire “je suis en difficulté” ou “je stresse à cause de mon déménagement”, va libérer de l’espace pour le travail.”
Nos émotions ne s’arrêtent pas à la porte de l’entreprise. Les écouter et les exprimer font partie des leviers pour protéger notre santé mentale. “Il est important aussi d’expliciter ses attentes, d’expliquer à son manager ce qu’il peut attendre de nous et ce dont on a besoin pour bien travailler : quels outils, quelle façon de faire, quel soutien”, ajoute Christophe Nguyen. Ne pas parler ou ne pas pouvoir le faire, cacher ses fragilités crée énormément de pertes d’énergie. “Le levier le plus puissant en matière de promotion de la santé mentale est le soutien que l’on va trouver auprès de son manager, indique Claire Le Roy-Hatala. Cela se traduit par une organisation du travail plus souple, des horaires aménagés, du temps partiel parfois… La recherche de solutions en co-construction est déterminante pour que la personne continue à être présente et performante.” Pas question de tout faire porter sur les épaules des seuls managers, qui ont leur propre vulnérabilité psychique : “Un manager n’est pas un magicien, il ne peut pas deviner ni trouver de solutions à la place de quelqu’un qui a un problème de santé mentale : c’est à cette personne d’être force de proposition pour partager ses besoins et idées d’aménagement pour travailler au mieux ensemble.”
Apprendre à lâcher prise
La vie professionnelle est faite de hauts et de bas. Nouveau manager, restructuration, décisions budgétaires… De nombreuses choses échappent à notre contrôle. “Il est important de déterminer quelle est notre zone d’influence personnelle, conseille Noémie Guerrin. Ce sont les choses sur lesquelles on peut agir et qui vont contribuer à renforcer notre santé mentale. À l’inverse de notre zone hors de contrôle personnel, sur laquelle on ne peut pas agir.” La première génère un sentiment d’accomplissement et de fierté, là où la seconde engendre frustration et culpabilité. L’enjeu : “Mobiliser son énergie sur ce qui nous fait avancer, plus que s’épuiser sur ce qui ne dépend pas de nous.” Respecter ses limites, c’est aussi accepter de demander de l’aide lorsqu’on n’y arrive pas, ou plus. Pour Claire Le Roy-Hatala, “c’est la capacité à accepter que nous ne sommes pas un surhomme, et formuler pour soi et les autres le fait qu’on a besoin de plus de temps, d’aide, ou qu’on est trop fatigué pour assumer toute la charge de travail impartie, qu’on a besoin de pouvoir la partager avec les autres.” À commencer par le manager lui-même, dont l’exemplarité est fondamentale pour que ses collaborateurs s’autorisent eux aussi à demander de l’aide.
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