Elle ne fait jamais de fautes d’orthographe. Elle répond à vos mails en trois secondes avec une politesse exquise. Elle peut générer du code sans bug du premier coup. “Elle”, c’est l’intelligence artificielle. Face à cette nouvelle collègue virtuelle quasi-parfaite, la pression monte d’un cran pour nous, humains.

La tentation est grande d’essayer de rivaliser, de gommer nos aspérités, de traquer la moindre petite erreur pour devenir irréprochables. Le perfectionnisme, déjà très présent dans nos cultures d’entreprise, trouve ici un nouveau carburant anxiogène.

Pourtant, chercher à atteindre cette perfection lisse est un piège. Non seulement c’est épuisant, mais c’est surtout une erreur stratégique. Dans un monde où la perfection technique devient une commodité accessible via un simple prompt, quelle est votre valeur ajoutée ?

Paradoxalement, votre plus grande force réside peut-être dans ce que vous essayez de cacher : votre faillibilité. Voici pourquoi il est urgent de réhabiliter le droit à l’erreur et l’audace de l’imperfection.

Pourquoi la perfection est devenue ringarde

L’IA excelle dans l’optimisation et la réplication de ce qui existe déjà. Elle est parfaite pour suivre des règles. L’humain, lui, excelle quand il s’agit d’enfreindre les règles, d’imaginer ce qui n’existe pas encore, et de faire des liens improbables.

Le perfectionnisme, c’est la peur de prendre des risques. C’est attendre que le projet soit blindé à 120% avant d’en parler, ce qui tue souvent l’agilité. C’est la procrastination déguisée en exigence.

Si vous visez la perfection, vous visez ce qu’une machine fera bientôt mieux que vous. L’innovation ne naît pas dans un laboratoire aseptisé où tout fonctionne du premier coup. Elle naît dans le chaos, le “test and learn”, les tentatives ratées et les accidents heureux. Rappelez-vous : la pénicilline, le micro-ondes ou les Post-it sont tous nés d’erreurs monumentales.

3 clés pour cultiver l’audace de l’imperfection

Accepter son imperfection ne signifie pas bâcler son travail ou se complaire dans la médiocrité. C’est, au contraire, une démarche exigeante qui demande du courage : celui de privilégier le mouvement et la créativité sur la sécurité du statu quo.

1. Adopter la règle du “suffisamment bon” ou 80% parfait

Le perfectionniste passe 80% de son temps à peaufiner les derniers 20% d’un projet. Ces détails que personne d’autre ne remarquera. C’est une déperdition d’énergie immense. Apprenez à identifier le point de bascule où le travail est suffisamment bon pour être partagé, testé ou lancé. L’objectif n’est pas de rendre une copie parfaite, mais de créer de la valeur. Lancez une version imparfaite, ou parfaite à 80%, récoltez des feedbacks réels, et itérez. C’est ainsi que l’on avance aujourd’hui.

2. Transformer l’erreur en donnée brute

Changez votre vocabulaire. Ne parlez plus d’échec, mais d’hypothèse non validée. Dans un processus d’innovation, une erreur n’est pas une faute, c’est une information précieuse. Ça n’a pas marché ? Très bien. Pourquoi ? Qu’avons-nous appris ? Si vous ne faites jamais d’erreurs, c’est probablement que vous ne prenez pas assez de risques et que vous vous contentez de gérer l’existant. Pour innover, il faut accepter qu’une partie de nos tentatives finissent à la poubelle. C’est le prix de la découverte.

3. Oser le brouillon créatif en réunion

L’IA vous donnera toujours une réponse structurée et finie. Pour vous différencier, osez partager vos pensées en construction. En réunion, ne soyez pas celui ou celle qui attend d’avoir la phrase parfaite pour intervenir. Soyez celui ou celle qui dit : “J’ai une idée un peu floue, ça ne marchera peut-être pas, mais si on explorait cette piste… ?”. C’est dans ces espaces d’incertitude, dans ces frictions créatives, que naissent les vraies solutions innovantes. L’imperfection invite au dialogue et à la co-construction, là où la perfection ferme la discussion.

Soyez fièrement faillible

La perfection est une fin en soi, statique et froide. L’imperfection est un processus, vivant et dynamique.

Face à la montée en puissance de l’IA, notre humanité n’est pas une faiblesse à corriger, c’est notre avantage concurrentiel ultime. Votre capacité à douter, à trébucher, à rebondir de manière inattendue et à penser hors du cadre est irremplaçable.

Alors, laissez tomber le masque du professionnel infaillible. Soyez audacieux. Soyez brouillon. Soyez humain. C’est là que se trouve votre vrai génie.

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Cécile Speich est co-dirigeante de Plotfox, cabinet de conseil spécialisé en stratégie et transformation RH. Depuis plus de 10 ans, elle travaille aux côtés des décideurs RH et surtout de leurs équipes, pour favoriser l’épanouissement individuel et en faire le moteur de le performance durable de l’entreprise. Engagée pour une meilleure conciliation entre vie professionnelle et personnelle, elle milite aussi pour l’empowerment des femmes.

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