De nombreux salariés vivent une double vie : travail à distance ou nomade et nuits à l’hôtel la semaine, retour dans le cocon familial le week-end. Comment s’organisent-ils pour travailler, supporter la fatigue des déplacements et garder le lien même à distance ? Témoignages.

On les nomme célibataire géographique ou couple TGV. Ces salariés dorment une ou deux nuits, voire la semaine entière, à l’hôtel pour des raisons professionnelles. Une vie, qui, même choisie, implique une organisation bien différente des salariés qui peuvent chaque jour dormir dans leur lit. Comment combiner travail, déplacements… et vie de couple ou vie de famille hachée ? Pour Marion Gaborit, chargée de qualité auprès des producteurs de groupement laitier Biolait, tout est question d’organisation. « Avec ma compagne, on note nos rendez-vous et nos jours de déplacements sur Google calendar », raconte-elle. En déplacement dans tout le quart Sud Est de la France « un tiers du temps » et sur les routes « un autre tiers », elle fait en sorte de rester à domicile les jours où sa compagne y est. « J’ai la chance d’organiser mon planning comme je le souhaite, donc je fais en fonction d’elle : par exemple, je télétravaille dès que je peux le vendredi, jour où elle ne travaille pas, comme ça on déjeune ensemble ». Elles se sont inscrits dans un club de volley-ball le vendredi soir, « ça fait du bien de faire une activité ensemble, après des semaines entières sans se voir parfois », apprécie-t-elle.

Gérer la fatigue pour bien travailler tout en ayant une vie sociale

Alexandra Martin enchaîne, elle, les déplacements en France, aux Etats-Unis et en Chine… « Je suis partie 60% du temps », calcule-t-elle. Spécialiste d’application dans une start-up de biotechnologies francilienne, elle a accepté le poste « sans trop se rendre compte de ce que ça impliquait au quotidien ». Si elle apprécie son travail, les voyages et les rencontres que cela lui offre, elle se « donne encore un an ». « Je suis avec mon copain depuis 9 ans, je vais avoir 29 ans… on aura sûrement d’autres projets, et cette vie-là n’est pas compatible avec des enfants », estime-t-elle. En attendant, elle s’organise avec ses valises, sacs et matériel professionnel pour « ne rien perdre en route », et « encaisse la fatigue » pour gérer son travail et ne pas faire que dormir en rentrant. « J’ai de la chance, on n’est pas un couple collé donc on vit bien cette distance », reconnaît-elle. Malgré le décalage horaire, ils s’appellent chaque jour, grâce à What’s app, et profitent des moments où elle rentre à Paris pour « voir les copains ». « Le plus compliqué, c’est que lui aimerait partir en vacances ou en week-end, mais moi, quand j’ai du temps, j’ai juste envie de me poser ! ».

L’éducation à distance

Prendre du temps en famille, c’est aussi le conseil numéro 1 de de Gwenaël. Animateur métier dans une grosse entreprise française, il laisse sa famille dans le Sud-Ouest du lundi au vendredi pour travailler à Paris. Après 20 ans en province, ce poste était une promotion… un peu obligatoire. « On a réfléchi avec mon épouse à déménager tous les trois, avec notre fils, mais elle est professeure et aurait eu du mal à avoir sa mutation pour repartir dans quelques années donc je suis parti seul, il y a deux ans ». « Ce n’est pas simple : c’est une charge énorme pour mon épouse », reconnaît-il. S’il essaie de lui faciliter la vie quand il est là, il est aussi lucide sur les difficultés des relations à distance. « On se téléphone tous les soirs avant le dîner : c’est important que mon fils me raconte sa journée, qu’on partage, que je le recadre aussi parfois. Mais être présent dans l’éducation, en étant à distance, ce n’est pas simple ». Les discussions de couple sont donc nombreuses « pour rester sur la même ligne ». « Mon fils me reproche parfois mon travail », regrette-il. Alors il travaille dans le train et en soirée la semaine pour « se consacrer 100% à la famille le week-end », ce qu’il ne faisait pas quand il rentrait tous les soirs. « Mon entreprise ne se rend pas compte du sacrifice familial que cette situation implique ». Gwénaël a accepté ce poste pour quatre ans. « Cela fait deux ans, et dans deux ans mon fils aura 12 ans, ce sera l’adolescence, je pense que c’est important que je sois là.»

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Crédit photo : pexels

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Titulaire d’un master de journaliste au Celsa (Paris), Lucie Tanneau est journaliste indépendante, sillonnant la France, et plus particulièrement l’Est de la France au gré des thèmes de ses articles. Elle collabore à de nombreux titres, de Liaisons sociales magazine, La Vie, et Okapi, en passant par Grand Est, l’Est éclair, Village, et Foot d’Elles.

1 COMMENTAIRE

  1. Bonjour

    Je vous remercie pour votre article.
    J’en parlais justement sur mon blog : il n’y a pas que les dirigeant-e-s qui ont des difficultés pour voir leurs enfants.
    Et bien souvent, on peut culpabiliser.

    Je trouve bien dommage que la direction ne montre pas plus de reconnaissance face à ce genre de sacrifice que font certains salariés, pour leur carrière, et pour leur entreprise.

    Devoir gérer l’éducation à distance ne doit pas être simple.
    Alors bravo de vouloir bosser avant de voir ses enfants, pour être à 100% avec eux quand le parent est avec ses enfants !

    Pour les plus curieux, je vous invite à lire mon article sur le sujet, du point de vue d’un parent entrepreneur : https://www.papa-et-patron.fr/comment-passer-du-temps-avec-ses-enfants/

    Au plaisir
    Evan

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